Comportement du chaton (4/5)
rôle de l'éleveur : favoriser les contacts et les stimulations
Période de socialisation
Chez le chat, la période de socialisation est précoce et courte. On
l’appelle également "période critique". En effet, pendant cette période,
toutes les stimulations et événements de vie vont laisser une marque mnésique
indélébile, alors qu’au delà de cette période, les apprentissages sont
moins bien mémorisés, du fait d’une perte de malléabilité du système
nerveux.
Cette période débute avec l’attachement réciproque. Le chaton découvre
le monde. Ses capacités sensorielles et motrices lui permettent d’intégrer
toutes les stimulations extérieures dans son système de référence et de
construire son niveau sensoriel de référence ou son homéostasie sensorielle.
Les trois processus fondamentaux d’apprentissage pendant cette période sont :
Ils se mettent en place de façon concomitante et sont liés entre eux.
La socialisation primaire
Il s’agit des processus de socialisation d’une part à sa propre espèce
(socialisation intraspécifique), et d’autre part aux autres espèces, comme
à l’homme ou au chien (socialisation interspécifique). La socialisation à
l’homme détermine la qualité de ses relations futures avec ses maîtres. La
socialisation à sa propre espèce détermine la qualité de ses relations
futures et sa capacité à cohabiter avec de nouveaux chats dans la famille.
La socialisation intra-spécifique
Le chat est réputé être un animal solitaire et donc peu sociable. En réalité,
quelques activités comme la chasse sont, dans la nature, des activités en
solitaire. Mais la cohabitation avec l’homme a diminué la nécessité de
chasser et a donc modifié la structure et l’organisation des relations
sociales. On peut observer des regroupements (couples, familles, matriarcats,
groupe de jeunes chats).
Pour qu’un chat soit bien socialisé à sa propre espèce,
il doit vivre avec sa fratrie au moins jusqu’à 7 semaines. Cette socialisation
intra-spécifique est optimum si le chaton provient d’une portée suffisamment
nombreuse (4 chatons minimum), et
s’il est resté avec ses frères et sœurs jusqu’à l’âge de 10 à 12
semaines. Un chaton séparé précocement de sa mère va s’identifier à
l’espèce qui l’aura élevé.
C’est au cours de jeux sociaux précoces que les chatons acquièrent les rituels de communications propres à leur espèce.
Les outils de communication se développent et sont utilisés dans le cadre
d’une organisation du territoire. La communication phéromonale est très
importante. Le flehmen apparaît vers la 5ème semaine et se développe pleinement vers la 7ème semaine
La socialisation interspécifique
Elle n’est pas indélébile, contrairement à la précédente. Le chat
ayant vécu avec ses congénères les reconnaîtra toute sa vie comme tels, même
s’il en est privé par la suite. En revanche la socialisation à l’espèce
humaine, qui va conditionner la tolérance au contact et la qualité des
interactions avec l’homme, doit être entretenue. Si le chat est privé de
contacts humains après la fin de la période sensible, il oublie et peut
redevenir "sauvage".
Pour qu’une socialisation interspécifique à
l’homme se réalise, il faut que le chaton
soit manipulé quotidiennement dans un contexte agréable et positif pour lui.
La socialisation est d’autant meilleure que le nombre d’humains qui le
manipule est grand. Il ne suffit pas de venir les nourrir. Le contact doit être
réel pendant au moins 30 à 40 minutes par jour. Il faut prendre les chatons
sur les genoux et pratiquer des caresses d’intensité croissante. Si la mère
présente des réactions de peur devant l’homme qui vient la nourrir, les
petits vont associer le danger à la présence humaine, et garderont un impact négatif
de cette présence. La socialisation interspécifique ne pourra pas ainsi se réaliser.
La période optimale pour commencer à manipuler un chaton en vue de le
socialiser à l’espèce humaine, se
situe entre la 2ème et la 7ème semaine.
L'acquisition des autocontrôles
Deux paramètres sont essentiels à l’acquisition des autocontrôles :
La vie en fratrie et l’apparition de jeux sociaux :
Ceux-ci se développent de la 3ème semaine à la 5ème semaine, puis déclinent
entre la 12ème et 14ème semaine. Les jeux individuels
avec les objets se développent à partir de la 6éme semaine et
atteignent leur apogée vers la 8ème semaine, quand la coordination
motrice est suffisamment installée.
D’après Beaver, les jeux sociaux
comptent huit séquences : ventre en l’air, debout, pas de côté, affût,
poursuite, cabrer, sauter, faire face. Les jeux individuels sont au nombre de quatre et simulent la chasse :
attraper une souris, sauter après un oiseau, terrasser un lapin, sortir un poisson de l’eau.
Les jeux individuels ont tendance à persister à
l’âge adulte chez le chat domestique. Le chien adulte joue rarement seul,
alors que le chat adulte est capable de jouer solitairement avec de menus objets
pendant des heures. La persistance de comportements infantiles à l’âge
adulte concerne également des comportements de succions et de pétrissage.
La présence de la mère :
Le rôle de la mère est primordial. Elle régule tous les débordements et empêche la fougue naturelle de se développer
de façon exagérée. Les chatons apprennent par imitation. Par exemple,
l’apprentissage de l’enfouissement des excréments se fait par imitation. Le
chat est ainsi considéré très tôt comme un animal très propre. Le
comportement de chasse naît également par imitation de la mère. Les jeux des
chatons préfigurent des actions de chasse. La mère et les expériences précoces
jouent un grand rôle dans la future dextérité à capturer des proies.
Cependant des chats isolés ont pu développer des aptitudes à la prédation en
l’absence de jeu. On peut donc admettre que les jeux permettent un entraînement
"efficace" sur un patron moteur préexistant.
Le chaton apprend à réguler
ses comportements moteurs en séquence bien réglée. Il apprend à rétracter
ses griffes, à contrôler l’impulsivité de ses réactions d’attaque, à
inhiber l’intensité de sa morsure.
L'acquisition de l’homéostasie sensorielle
L’importance des stimulations garantit une bonne homéostasie sensorielle.
La perception des stimuli de l’environnement permet de construire un niveau
de référence émotionnel, qui correspond à un niveau de tolérance aux
futures stimulations. Il est important de bien stimuler les chatons vis à vis
de manipulations corporelles, vis à vis des couleurs, textures, types de
substrats, variations de température, bruits, et odeurs qui plantent le décor
de leur environnement de vie future.
Le milieu de vie ultérieur doit être en
adéquation avec le milieu de vie de développement. Le passage d’un milieu
hypostimulant pendant le développement à un milieu hyperstimulant va provoquer
des réactions de peur et une incapacité à gérer tous les stimuli qui
n’auront pas été intégrés préalablement au système de référence.
Inversement, le passage d’un milieu hyperstimulant permettant au chat
d’exercer ses talents de chasseur à un milieu hypostimulant où il va vite
tourner en rond, comme dans un appartement, ne sera pas toujours bien vécu et
peut engendrer des réactions anxieuses dues au confinement.
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